En attendant la suite, sans aucun doute la semaine la plus forte et marquante de mon séjour.
Atelier clown, le Fou Sage, le clown des pieds à la tête en passant par l’estomac. Tel est l’intitulé de l’atelier que j’ai eu le privilège d’offrir aux candidats apprentis clowns. Tous des comédiens, pour certains auteur de théâtre, metteur en scène, jongleur, réalisateur de cinéma.
Les mots ne seront pas assez précieux, vivants, émouvants, pour décrire cette semaine tellement riche.
Avant cela, quelques mots sur la voiture de Nanaboco : enfin prête, dédouanée, contrôlée, assurée, immatriculée, imposée, réparée pour des bricoles, et remaquillée sur les côtés, depuis lundi nous sommes motorisés !
Je bûche le plan de Yaoundé, et je peux désormais conduire seule sur quelques itinéraires reconnus ! je ne suis pas peu fière !
Ça n’a pas duré : jeudi soir, pour un mini-détour et quelques manoeuvres pour passer à la boulangerie pour combler un petit creux, je comble par inadvertance un grand trou : l’avant de la voiture tombe dans un grand cratère profond au milieu de la route. Impossible de bouger, le comité de vigilance du quartier vient rapidement me sortir de là, mais le résultat est que le carter a été déchiré par un caillou, voiture en panne jusqu’à ce que nous trouvions une pièce de rechange Peugeot, ce qui n’est apparemment pas simple. Je suis à nouveau piéton en taxi. On va faire comment ? on va supporter ! devise nationale ici au Cameroun.
Revenons à l’atelier clown.
Une troupe de 11 artistes s’est initiée à cette forme d’expression tellement nouvelle pour eux. Parmi eux, un des clowns actifs pour l’association Nanaboco, humoriste de formation, qui n’avait jusqu’ici reçu de notre part qu’une petite initiation de 3 jours en janvier dernier et qui s’est joint aux débutants en toute humilité.
Découverte est le maître mot de la semaine.
Découverte des uns et des autres, découverte de soi-même pour certains, découverte d’une forme de liberté régie par des codes simples, découverte de leur enfant intérieur, découverte du travail impulsé par le corps et les sens.
Découverte d’un personnage qui va bien au-delà de leurs représentations du clown bouffon grotesque qui doit faire rire à tout prix. Découverte de la poésie du clown.
Découverte des marionnettes et de la façon de les animer, découverte de l’univers vaste et varié du clown par la projection d’extraits de vidéo de clowns aussi différents que Gardi Hütter, Slava, Dimitri, les clowns de cirque, les clowns de rue, les Clowns sans Frontière, les Dr.Rêves de la Fondation Theodora, les clowns Nanaboco au HGoPY, etc etc.
Découverte d’un outil de travail soit pour leur parcours de comédien, soit pour concrétiser cette formation et obtenir rapidement des petits contrats en tant que clowns d’animation, de fêtes, d’anniversaire, en plus de l’approche centrale de l’état de clown, savoir-être plus encore que savoir-faire. Découverte décisive des jeux de coopération pour casser la tendance de plusieurs à ne jouer que le conflit qui finit par bloquer le jeu. Le conflit c’est la vie, mais il s’agit de jouer le conflit, et d’en sortir aussi parfois. Découverte des jeux de rôle. Découverte de leur tempérament exprimé en clown, découverte de l’éventail plus riche qu’il n’y parait de leur palette d’expression et de caractère.
Découverte pour moi de ma capacité à guider, diriger un groupe et des individus dans leur recherche personnelle du clown, dans une grande complicité et bienveillance mutuelle.
Parce que c’était eux, attentifs, curieux, concentrés, ouverts, humbles et parce que c’était moi, ceci dit sans vantardise et sans fausse modestie, tout le monde en est sorti gagnant, y compris l’organisateur de Théâtre en Folie, Junior Esseba, qui a assisté à des moments de l’atelier et m’a confié que ma pratique lui avait ouvert des pistes de travail.
De mon côté. j’ose parler d’une histoire d’amour envers chacun des participants. J’ose parler d’un grand sentiment d’être la bonne personne à la bonne place lorsque j’ai vu l’un ou l’autre évoluer dans sa manière d’être, sa posture, son assurance, au fil de la semaine. L’atelier est fini, la suite appartient à chacun, mais d’ores et déjà, comme ils l’ont demandé, nous ne les laisserons pas tomber et d’une manière ou d’une autre, d’autres collaborations auront lieu entre Nanaboco, Théâtre en Folie, et ces nouveaux clowns.
La suite : dans l’immédiat, une restitution publique le 10 décembre au Centre Culturel Camerounais, les détails et invitations suivront. Ils ont travaillé durant l’atelier à l’ébauche de leur création de restitution, j’ai été conquise et admirative de leur créativité. Nul doute qu’en travaillant de manière semi-autonome durant les 2 semaines qui viennent, ils se présenteront comme une magnifique troupe de clowns devant les invités.
Le président de Nanaboco m’avait chargée de déceler de potentiels clowns d’hôpital parmi le groupe. Jeudi prochain 30 novembre, 3 candidats se joindront à Ordinateur, clown Nanaboco déjà actif, pour une visite-test de leurs aptitudes et de leur volonté et aisance à évoluer auprès des enfants hospitalisés.
Dès que nous aurons le feu vert des hôpitaux sollicités, nous aurons ainsi une saine émulation et de l’énergie neuve et juvénile dans notre troupe du Cameroun.
Je vous laisse découvrir vous aussi quelques images de cet atelier. De mon côté j’ai les yeux pleins d’étoile d’avoir eu cette occasion de partager ma passion qui va au-delà de l’art du spectacle de clown, mais bien vers une façon d’être au monde. Sans aller jusqu’à la clown-thérapie, en lui-même le clown est un guérisseur, pour les individus, pour les groupes, pour cette planète. Son initiation passe par la connaissance de lui-même, par la mise en conscience de ses mouvements inconscients. Le clown met de la lumière dans nos zones d’ombre.
